Bref historique de l’évaluation des politiques publiques en France

Les prémices de l’évaluation des politiques publiques pourraient se trouver dans le déclaration des droits de l’homme et du citoyen d’août 1789 et son article 15 :

 Déclaration des droits de l'homme et du citoyen d’août 1789, article 15, évaluation, www.eval.fr
Déclaration des droits de l’homme et du citoyen

« la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration »

En 1983 est organisé un colloque sur l’évaluation des politiques publiques par le Ministère de l’Economie des Finances et du Budget.

En 1986 parait le rapport  Evaluer les politiques publiques. Méthodes, déontologie, organisation, sur commande du Commissariat Général du Plan, coordonné par Michel Deleau.

Evaluer les politiques publiques : Commissariat Général du Plan, évaluation, www.eval.fr
Rapport Deleau dit Nioche-Poinsard

Une nouvelle réflexion sur l’évaluation des politiques et des actions publiques est confiée par le premier ministre Michel Rocard à Patrick Viveret en 1988 (rapport Viveret, 1989).

La « circulaire Rocard » signée par premier ministre le 23 février 1989, sur le renouveau du service public définit 4 grandes orientations dont le devoir d’évaluation des politiques publiques.

Un grande partie des propositions du rapport Viveret seront reprises dans le décret du 22 janvier 1990 relatif à l’évaluation des politiques publiques.

L’évaluation d’une politique publique au sens du présent décret a pour objet de rechercher si les moyens juridiques, administratifs ou financiers mis en oeuvre permettent de produire les effets attendus de cette politique et d’atteindre les objectifs qui lui sont assignés.

Ce décret instaure :

  • un comité interministériel de l’évaluation
  • un fonds national de développement de l’évaluation
  • un conseil scientifique de l’évaluation

Le conseil scientifique de l’évaluation sera remplacé par un conseil national de l’évaluation (Décret n°98-1048 du 18 novembre 1998 relatif à l’évaluation des politiques publiques).

La loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er  août 2001 introduit une culture de performance, les administrations doivent rendre des comptes sur l’efficacité de l’utilisation des crédits qui leur ont été attribués. L’Etat se fixe des objectifs précis à atteindre, assortis d’indicateurs de performance. La LOLF s’inspire de la « nouvelle gestion publique » ou « new public management ».

En 2007, la RGPP (« révision générale des politiques publiques ») vise la réforme de l’état et l’amélioration des politiques publiques. L’angle principal retenu est la baisse des dépenses publiques soit à travers le prisme principal du critère de l’efficience. Les critères de pertinence, la cohérence ou l’impact ne sont pas considérés (voir les critères d’évaluation).

La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 introduit dans la définition de missions du Parlement une référence expresse à l’évaluation. Le nouvel article 24 de la Constitution  dispose que : « Le Parlement vote la loi. Il contrôle l’action du Gouvernement. Il évalue les politiques publiques. »

Egalement, les projets de loi (les textes à l’initiative du Gouvernement) doivent obligatoirement être accompagnés d’une « étude d’impact ».

Exemple d'étude d'impact en France sur la loi de financement de la sécurité sociale : les impacts socio-économiques ou sur l'environnement apparaissent comme sans objet : vraiment ? www.eval.fr
Evaluations d’impact : un progrès perfectible… Ici, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 n’aurait ainsi aucun impact économique, social ou environnemental, pas plus qu’un impact sur les jeunes ou personnes en situation de handicap.

En 2012, la MAP  (modernisation de l’action publique) remplace la RGPP… Le SGMAP, secrétariat général rattaché au Premier ministre, en appui à un comité interministériel, avait entre autres ambitions l’évaluation systématique de toute politique publique. Environ 80 évaluations de politiques publiques ont été menées, dans des styles éclectiques, sur la durée du quinquennat 2012-2017.

évaluation www.eval.fr SGMAP
Exemple d’évaluation réalisée sur la durée du SGMAP. Le lien ne fonctionne plus. Vous avez dit apprentissage institutionnel ?

En 2017, le SGMAP laisse place à la Direction Interministérielle de la Transformation Publique (DITP) … (Décret no 2017-1584).

Article 4
La DITP promeut les actions permettant de mieux prendre en compte les attentes des usagers, des agents et des partenaires de l’Etat, et d’améliorer et d’évaluer la qualité de service. … Elle est chargée de l’animation et de la coordination des travaux d’audit et d’évaluation des politiques publiques. 

Pourtant, l’évaluation sort totalement du champ lexical de la DITP. Dans sa page de présentation, la DITP réalise même la performance de ne pas afficher ou mentionner une seule fois « évaluation de politiques publiques » ni même « évaluation« .

Puisque le décret mentionné ci-dessus évoque « l’évaluation des résultats », est-ce que l’évaluation de politiques publiques ne devrait pas avoir comme source première ou support originel, le respect des engagements, le suivi des programmes des candidat.e.s aux échéances électorales ? Fussent-elles, locales, nationales ou européennes ?

En commençant par les engagements des candidats en matière d’évaluation de politiques publiques :

Quelles sont les propositions des candidat.e.s à l’élection présidentielle en matière d’évaluation des politiques publiques ? Analyse des programmes des 12 candidats, Théophile Courtier, Mars 2022

Récapitulons :

évaluation des politiques publiques en France : les évolutions institutionnelles - de la Rationalisation des Choix Budgétaires à la Direction Interministérielle de la Transformation Publique
Bref historique de l’évaluation des politiques publiques en France. La DITP ne mentionne cependant plus l’évaluation de politiques publiques dans ses missions.

Mentionnons aussi l’existence de France Stratégie, ex-commissariat général du Plan transformé par le décret du 22 avril 2013 en Commissariat général à la stratégie et à la prospective ou France Stratégie. Institution autonome placée auprès du Premier ministre, France Stratégie « produit également des évaluations de politiques publiques à la demande du gouvernement ». Le plan France Relance, l’expérimentation « Territoires zéro chômeur de longue durée », la loi PACTE bénéficient ainsi d’un comité d’évaluation piloté par France Stratégie (voir ici).

Prochaine évolution : la loi 3DS

Depuis 2022, la loi dite « 3DS » crée une compétence d’évaluation des politiques publiques pour les chambres régionales des comptes (CRC).

A suivre…

Pour aller plus loin :

Date de 1ère diffusion : 2012
Date de dernière actualisation : 2024