Les méthodes accélérées de recherche participative (ou P.R.A. : Participatory Rural Appraisal) développées dans les années 1990 s’inspirent d’une part des écrits du pédagogue Paolo Freire : toute communauté devrait être en mesure d’analyser sa propre réalité sociale à des fins de la transformer. Mais aussi en réaction à des programmes de développement déconnectés des réalités locales, de processus longs et couteux de collecte de données visant la production d’état des lieux, déjà obsolètes voire biaisés au moment de démarrer l’action.
Ces méthodes dites « accélérées de recherche participative » sont développées pour extraire des savoirs locaux sur des temps courts, en priorisant toute forme d’expression qui permette une participation effective. Par exemple et si nécessaire en se passant de l’écrit. Les participants sont considérés comme des partenaires à part entière et non des échantillons représentatifs. Les facilitateurs ne sont pas mandatés à diffuser des objectifs préalablement définis mais dans une posture d’écoute et de partage des analyses.
Ces approches se sont déclinées en une multitude de combinaisons au fil des années et des secteurs d’intervention, des appropriations institutionnelles, tâchant de garder néanmoins en leurs centres :
- une approche systémique
- la multidisciplinarité
- un recherche de complémentarité via des équipes des plus hétéroclites
- une volonté d’apprentissage en temps réel
- une flexibilité et approche pragmatique des apprentissages
- l’interraction et les apprentissages de groupe
- la créativité, l’ingénuosité, l’innovation
- la mise en confiance comme préalable
Exemples de techniques utilisées
- observations, entretiens, groupes de discussion
- jeux, cartographie, dessins, photographie, vidéo,…
L’hétérogenéité des groupes constitués nécessite également la maitrise de techniques de gestion de conflit. Ces conflits puis modalités de résolution exacerbent les valeurs portées par les participants et par la même oriente et éclaire le système de suivi et évaluation en place ou en gestation.
Quel intérêt de la MARP dans le cadre de mise en place d’un système de suivi évaluation ?
Un autre principe de la MARP est l’ignorance optimale : il est vain de vouloir prétendre maitriser l’ensemble des processus et des données. Les ressources sont limitées et mieux vaut se concentrer sur l’essentiel.
La prétention d’exhaustivité est une limite récurrente de dispositifs de suivi et évaluation. Les présentations s’enchainent démontrant un écart plus ou moins limité entre les prévisions et le réalisé. Pourtant, un seul grain de sable très localisé est susceptible de gripper l’ensemble des rouages.
La capacité de réponse à une question évaluative spécifique détectée en amont est cruciale. Parmi la multitude de questions évaluatives ébauchées à l’étape 2 (voir les étapes de conception d’un système de suivi et évaluation), la capacité de débrayer à tout moment pour approfondir une thématique déjà présente ou à intégrer une nouvelle question évaluative « hors tout ». C’est à dire, notamment en terme de capacité budgétaire, sans paralyser l’opérationnalisation du programme, être en mesure de dégager les ressources nécessaires à une mission exploratoire de type « MARP » aboutissant à une éventuelle réorientation stratégique.
Le champs d’application est ainsi infini, de la MARP exploratoire, MARP de planification, MARP de suivi, MARP d’évaluation, MARP d’apprentissage, MARP genre ou environnementale…
La MARP peut être déclenchée pour l’analyse d’un simple critère d’évaluation : c’est bien le processus qui est déterminant à travers ses principes de réactivité, de flexibilité et bien sûr de participation effective.
L’approche MARP s’applique au programme mais également au système de suivi évaluation. Toute question évaluative liée à un dysfonctionnement du système, pourra être mandatée à trouver une réponse urgente et itérative. Eclairer une situation problématique et spécifique.
Pour aller plus loin
- La pédagogie des opprimés, Paolo Freire, 1968
- The Origins and Practice of Participatory Rural Appraisal, Institute of Development Studies, Robert Chambers, 1994
- Participatory Learning and Action : a trainer’s guide, Jules Pretty, Irène Guijt, John Thompson, Ian Scoones, IIED, 1994