L’apprentissage organisationnel dans un processus de recrutement

Produire de la connaissance à chaque étape du recrutement

La production de connaissances dans une démarche d’amélioration continue est à intégrer à chaque étape d’un processus de recrutement. Ceci pour l’institution qui porte le recrutement : en quoi les recrutements antérieurs forment un socle de connaissance de départ ? comment affiner le besoin en compétences tout au long du processus de recrutement ? en quoi ce process nourrit la réflexion stratégique organisationnelle à chaque étape ? Mais également pour le candidat : à minima, quels sont les parcours et accompagnements proposés pour une montée en compétences ?

I. Phase préparatoire

Alignement stratégique 

Quel que soit le type de poste à pourvoir et l’urgence du recrutement, une première vérification de base consiste à vérifier que les compétences qui seront apportées entrent bien dans le plan stratégique global, en cohérence avec les valeurs de l’organisation et de son mandat. 

Préalable et outils nécessaires :

Cette phase nécessite la disponibilité des outils suivants au niveau de l’organisation qui porte le recrutement comme socle de base : 

– politique de recrutement
système de suivi et évaluation

Appliquer la règle des 3 fois (au moins) pourquoi :

  • Pourquoi devrait-on compléter l’équipe avec un poste de x ?
    Parce que l’équipe actuelle croule sous la charge de travail et ne s’en sort plus.
  • Pourquoi l’équipe croule sous la charge de travail ?
    Car le nombre d’usagers (bénéficiaires, clients, patients, etc.) a été démultiplié.
  • Pourquoi le nombre de d’usagers a explosé ?
    Ici se trouve forcément un questionnement d’ordre contextuel en lien avec une réponse stratégique de l’institution.

Le processus de validation hiérarchique avant de lancer la phase active de recrutement s’accompagne ainsi d’une courte note à consonance stratégique afin de documenter et valider la pertinence de ce recrutement au regard de la politique institutionnelle. Cet exercice peut s’élaborer à travers une modélisation basique.

Un certain nombre d’outils et de process établis permettront de fluidifier la suite du processus de recrutement. L’absence de ces outils ne signifie pas retarder l’opérationnel et le démarrage du recrutement mais de poser un constat qui permettra de développer parallèlement les outils manquants.

Cet apprentissage en double boucle vise à éviter la reproduction de stratégies inefficaces, ne pas reproduire des actions identiques qui se sont déjà révélées inopérantes par le passé. Cela implique une certaine prise de risque qui doit être appréciée, validée, encouragée et suivie.

Visibilité du processus de recrutement

Est-ce que les étapes à venir sont suffisamment précises et explicites ? Est-ce que les processus décisionnels à chaque étape du recrutement sont déterminés ? Est-ce qu’un protocole existe pour l’intégration et la formation initiale (voir point 6) ? Est-ce qu’un espace de travail est disponible ou encore le matériel nécessaire à la prise de fonction ?

Disponibilité des outils :

Socle de base : 

référentiel de compétences
– cartographie des compétences

II. Rédaction de la fiche de poste

L’élaboration d’une fiche de poste, impérativement sur mesure, débute par la consultation du référentiel de compétences du métier concerné. La première démarche consistera ensuite à consulter la cartographie des compétences en interne afin de vérifier à quel point ces compétences sont potentiellement déjà présentes dans l’organisation. Si le besoin de recrutement externe se confirme, solliciter les collaborateurs concernés disposant déjà de ces compétences métiers permettra  : 

  • d’affiner ou de vérifier la pertinence globale de l’annonce
  • de confirmer la validité des termes techniques sélectionnés
  • une appréciation de la disponibilité de candidats sur ce type de poste
  • un retour d’expérience sur leur propre recrutement sur des postes similaires afin d’améliorer le processus à venir

L’annonce comportera aussi bien la présentation de l’organisation du suivi, évaluation, apprentissage au niveau de la structure – que les missions/tâches incombant au postulant en terme de suivi, évaluation, apprentissage.

III. Diffusion de l’offre

L’analyse des canaux de recrutement sont sources d’enseignements. Est-ce que l’offre est relayée fortement via des réseaux sociaux professionnels ? L’offre suscite-t-elle un engouement au regard des commentaires portés sous le post ? Quelles sont les communautés de pratique les plus en phase avec notre activité et susceptibles de relayer l’offre ? Le service dispose-t-il d’une vaste base de données de candidatures spontanées ou un vivier de candidats concernant ce type de qualification ?

Cette étape s’appuie sur vos partenaires d’apprentissage. Toute institution ou individu engagé sur une même cause d’intérêt général : ministère, collectivité locale, établissement public et experts du domaine concerné. Ou encore reflète l’inclusion des établissements de formation initiale avec votre organisation : les offres sont diffusées par les universités, centres de formations, réseaux des anciens élèves, etc. à travers les partenariats déjà en place grâce à votre politique d’apprentissage institutionnel. 

IV. Sélection des candidats

Etat des lieux du vivier de ressources

Les candidatures réceptionnées permettent de dresser un état des lieux en terme de nombre et de qualité des candidatures. En fonction du type de poste, un recrutement récurrent sur des fonctions traditionnelles ou au contraire de nouvelles compétences sur des fonctions innovantes, l’apprentissage consistera à affiner les différents paramètres afin de permettre à chaque cycle de recrutement une annonce plus ciblée.

Nous avons ici une visibilité uniquement sur l’offre mais pas sur le nombre de candidats mieux qualifiés qui ont déclinés notre proposition. Et si la période de candidature avait été plus longue ou prolongée ? Et si le niveau d’expérience ou de qualification requis avait été inférieur ? Et si la rémunération avait été plus attrayante ? Et si la description du poste avait été mieux formulée ? Est-ce que la réputation de l’institution a servi ou desservi l’annonce ?

Bien sûr cette étape s’appuie sur la politique de recrutement et la balance permanente entre deux priorités potentiellement divergentes :

  • mettre en avant les valeurs/principes/motivation du candidats et compléter/former ensuite aux compétences
  • mettre en avant les qualifications et compétences du candidats au détriment éventuel des valeurs/principes/motivations

Mieux vaut-il un profil débutant susceptible de s’impliquer plus longtemps dans le projet ou un profil plus expérimenté susceptible de quitter le projet à la première offre ? etc. 

Exemples de paramètres ayant potentiellement influé sur l’exhaustivité de l’offre :

  • délai de recrutement
  • type de contrat
  • compétences et qualifications minimales
  • rémunération
  • plan de renforcement des compétences
  • image et réputation de l’organisation
  • caractère obligatoire de fournir des références/démotivation du candidat qui n’ose pas solliciter de potentielles références
  • autres critères d’éligibilité (nationalité, concours, permis de travail, équivalence de diplôme)

Affiner les critères de sélection

Cet état des lieux permet d’affiner les critères en fonction d’un état de référence. Potentiellement de remodeler l’offre voir de la suspendre bien sûr en toute transparence et loyauté vis-à-vis des postulants. Distinguer les paramètres sur lesquels l’équipe de recrutement dispose d’une marge de manoeuvre immédiate, ceux qui nécessitent une validation hiérarchique et ceux sur lequel la structure n’a aucune prise. 

Exemple de critères qui peuvent être réajustés :

  • degré de compétences techniques
  • connaissance de la langue ou de la zone d’intervention
  • adaptabilité du poste (durée de la mission, télétravail, etc.)

Exemple de critères sur lesquels la structure n’a aucune ou très peu de prise 

  • sécurité de la zone d’intervention

V. L’entretien d’embauche

L’entretien est le premier temps d’échange où seront confrontés les attentes et les enjeux en terme d’apprentissage, l’adéquation de l’offre et de la demande de savoir.

Les questions ci-dessous sont à insérer dans le cadre d’un entretien classique, suite à la présentation du parcours ou de la motivation du candidat, comme un chapitre à part entière légèrement en marge de l’entretien, une certaine relation de confiance nécessitant d’être préalablement établie. 

Exemples de questions de la part du recruteur : 

En terme de formation professionnelle, quelles sont les dernières formations que vous ayez suivi ?  Quelle était votre demande, vos options, les choix que vous avez dû effectuer ? Qu’avez vous tirer de ces formations ? Plus globalement, qu’avez-vous appris de votre parcours professionnel ? 

Pensez-vous avoir développé au delà des compétences des manières de faire spécifiques ou innovantes au cours de votre parcours ? Avez-vous plus appris de vos succès ou de vos échecs ? Comment apprenez-vous ? Plutôt autodidacte ? Plutôt sous forme de tutorat ? Avez-vous une appétence pour la formation ou la transmission ? Si vous rejoignez notre structure, quelles seraient vos attentes en terme de formation professionnelle ? 

Exemples de questions de la part du candidat : 

Pourriez-vous évoquer la politique de la structure en terme de formation continue ? Quelles sont les actions de formation dispensées ? Sous quel format ?

Bien sûr la durée d’un entretien est trop courte pour aborder la thématique de manière exhaustive. Néanmoins ce temps consacré aux différents volets de l’apprentissage permettra d’aborder sous un nouvel angle les questions de compétences, de motivation, du positionnement idéal du postulant dans l’organisation. Pour le candidat, c’est un exposé très brut de la considération apportée au développement des compétences en interne et au delà à la gestion des parcours professionnels dans l’organisation. En complément des ambitions, quelques indicateurs clés permettront de prendre la mesure de ce volet, par exemple, le nombre d’heures de formation par an/salarié, la répartition des heures de formation par thème, le pourcentage de salariés ayant bénéficié d’une action de formation certifiante.

Apprendre à conduire un tramway à l’aide d’un simulateur…

VI. Intégration

Les apprentissages sont au coeur de la phase d’intégration. Les modalités sont multiples et complémentaires :

  • tutorat, mentor ou binôme
  • kit d’intégration
  • présentation auprès des collaborateurs
  • parcours découverte (visite terrain des différents sites et services, immersion)
  • plateforme d’apprentissage en ligne
  • formations internes
  • dialogue avec les différentes fonctions supports
  • fiches explicative des process et du poste de travail 
  • période de tuilage ou passage de relais
  • accompagnement et suivi de l’intégration
  • l’informel – en prenant exemple sur la pause café suédoise, FIKKA, axée sur la convivialité, apprendre à se connaitre, à apprécier les diverses personnalités qui composent l’équipe…

Lors d’une prise de poste en distanciel plus que jamais, aucun élément ne doit être négligé qui laisserait le membre d’équipe, tâtonner, improviser, partir sur de mauvaises bases. 

Diverses facettes sont à considérer :

  • les valeurs et l’éthique
  • les règles et process
  • les circuits d’information
  • les consignes de sécurité et de confidentialité
  • les pratiques métiers

Un certaine autonomie demeure afin que le collaborateur puisse également orienter son apprentissage et s’immerger en fonction des contraintes actuelles de son équipe. L’apprentissage devra surtout s’avérer à double sens : profiter d’un regard neuf sur nos pratiques. 


Date de première diffusion : 2023