Les chaines de résultats sont souvent réalisées dans des situations de prestations de services :
- pour solliciter un financement auprès d’un bailleur de fond, par exemple dans le cadre d’un appel d’offre
- pour suivre l’évolution du projet par la suite si le financement est octroyé
Si la chaine de résultats est développée par une administration centrale dans un cadre interne et pour sa propre administration, l’objet demeure similaire, détecter les écarts entre des objectifs initiaux et ce qui a mesurablement été atteint en terme de résultats.
Peu importe le format, que cela soit sous forme de « matrice de résultat » ou encore de « cadre logique », le document nécessite d’être verrouillé, c’est à dire finalisé, pour être exploitable. Sur chaque facette de la logique d’intervention s’ agrége des indicateurs et pour chacun d’entre eux les cibles à atteindre.
Puisque l’engagement est contractuel, il est extrêmement complexe de revenir en arrière, chaque altération nécessitant un potentiel avenant au contrat. A titre de comparaison, si 1000 unités d’un produit x ou y ont été commandées auprès d’un fournisseur, difficile de modifier une fois que la production est lancée…
Par ailleurs le versement des fonds est conditionné à l’atteinte progressive des résultats. Le fournisseur produit ainsi, contractuellement ce sur quoi il s’est engagé. Ni plus, ni moins, quel que soit le secteur ou le domaine concerné, quelle que soit la politique publique . L’évolution du contexte, du besoin, des contraintes ou des aspirations est alors une considération annexe.
Pourtant toutes ces phases (analyse du contexte, analyse des parties prenantes, analyse des problèmes, analyse des réponses potentielles, analyses des stratégies) sont bien centrales pour aboutir à la logique d’intervention. Néanmoins celles-ci disparaissent du champs de vision et du document cadre une fois la stratégie actée : par exemple le contexte d’intervention n’apparait plus sur une chaine de résultats. La chaine de résultat apparait ainsi « hors sol ».
Aussi, cette phase stratégique est souvent superficielle : par défaut puisque à ce stade le financement n’est pas acquis ! Ce n’est qu’une fois le financement débloqué que l’opérateur va s’imprégner du contexte et percevoir les maillons faibles de la chaine. Trop tard.
Les corrections vont se limiter à détecter les écarts afin de pouvoir les combler. Accélérer au besoin pour atteindre les cibles pré-établies.
Ce que Argyris et Schön ont intitulé l’apprentissage en simple boucle. A l’opposé, l’apprentissage en double boucle va permettre d’ajuster la stratégie d’intervention en permettant de reprendre réflexion sur ses propres hypothèses et son propre rôle en tant qu’acteur endogène, là où le projet n’existait auparavant que de manière virtuelle.
En bref : l’apprentissage dans une chaine de résultats
Les chaînes de résultats, une fois « verrouillées » pour obtenir un financement, se figent et deviennent opposables. Elles se focalisent sur l’atteinte d’objectifs quantifiables et ignorent l’évolution du contexte, des besoins et des parties prenantes. Cette approche conduit à un « apprentissage en simple boucle » où l’on se contente de corriger les écarts pour atteindre les cibles préétablies, sans remettre en question la stratégie initiale.
Ces chaînes de résultats risquent de se transformer en autant de carcans qui empêchent l’adaptation et l’innovation. La mise en place du système de suivi et évaluation participe à une approche plus dynamique et contextuelle, basé sur un apprentissage continu, en éclairant non seulement les évolutions de contexte mais également en incorporant le corpus de valeurs sur lesquelles repose l’action.
Pour aller plus loin :
Date de diffusion : 2023
Dernière actualisation : 2024
Sébastien Galéa