L’utilisation d’échelles de changement (ou encore échelles de progrès,…) va aussi permettre un deuxième degré d’analyse en complément des indicateurs simples (notamment les Indicateurs Objectivement Vérifiables) sollicités dans un cadre logique.
Dans l’exemple ci-dessous, le domaine de changement visé est la participation active des femmes dans les processus de prise de décision :
- un indicateur quantitatif est le % de femmes dans les comités de pilotage
- en complément, une échelle pourra être proposée pour apprécier la participation effective dans les processus de prise de décision
Certaines méthodes, comme la cartographie des incidences, proposent ainsi de collectivement réfléchir aux différentes étapes (marqueurs de progrès) qui jalonnent le parcours vers une situation espérée.
L’échelle de participation de Sherry Arnstein, développée en 1969, permettait déjà d’apposer un regard qualitatif sur une démarche de participation citoyenne : non participation, coopération symbolique ou prises de décisions effectives ?
L’utilisation de jalons (étapes, marqueurs…)
La première échelle de progrès présentée ci-dessus (participation de femmes) ne comportait qu’un seuil minimum et un seuil maximum. Pour autant, il est intéressant d’essayer de construire des chemins de changement, d’anticiper à priori ou de retracer à posteriori les grandes étapes vers le domaine de changement souhaité.
Soumettre en atelier un premier niveau de graduation très basique comme présentés ci-dessous se relève instructif et permettra à terme de développer les échelles :
- Chaque condition préalable au passage d’un jalon, s’inscrit comme autant de jalons supplémentaires
- Tout retour/perception d’une partie prenante suite au passage d’un jalon s’inscrit comme élément évaluatif (en lien avec l’exemple ci-dessous : qu’est-ce qui a changé depuis la création de commission locale ?) à mettre en perspective avec le but initial (quelle contribution à la protection des ressources naturelles ?)
Echelles de changement : exemples
Exemple 1 : préservation des ressources naturelles
Exemple 2 : participation des usagers
Les échelons négatifs : partir de la situation réelle
De l’intérêt de formaliser un premier échelon négatif
Ci-dessous, un format qui se distingue par l’intégration d’un premier échelon reflétant une situation négative. En effet, beaucoup de projets/programmes considèrent comme premier niveau de résultat des produits tangibles. Cet éclairage sur le positif uniquement ou sur les effets espérés à terme ne reflètent pas l’atténuation de situations non désirées à très court terme ou la persistance de la situation problématique de départ.
Exemple 3 : domaine de changement visé => l’accès à l’eau
Exemple 4 : domaine de changement visé => réduction des déchets dans les résidences de tourisme
Exemple 5 : favoriser l’augmentation de l’usage du vélo auprès de la population
Envisager le changement comme un parcours
Parcours technique : conception de processus ou de protocoles
Ces échelles permettent aussi de concevoir des processus ou des protocoles. Ces processus/protocoles participent à la fonction de transparence du système de suivi évaluation en informant les diverses parties prenantes sur le degré d’avancement de l’action.
Dans l’exemple ci-dessous (recrutement d’un géomaticien au niveau d’une organisation internationale), un recrutement est en cours depuis des mois mais aucune partie prenante ne semble connaitre l’avancée de la situation ou le point de blocage. L’élaboration de l’échelle ci-dessous revêt aussi bien des enjeux opérationnels, par exemple en lien avec la qualité de l’intégration du nouveau collaborateur (formation, équipement, etc.) mais aussi de redevabilité en informant le comité de pilotage sur l’état d’avancement du recrutement. Dans cet exemple très pragmatique, l’annonce a bien été publiée mais encore aucun candidat n’a été reçu.
Les parcours de comportement
Des échelles comparables ont également été développées dans le cadre de la pédagogie institutionnelle dans les années 1950. L’échelle n’est pas utilisée ici pour poser un diagnostic sur une situation mais sur un niveau de compétences.
Variante : pour chaque groupe de compétences validé, des responsabilités nouvelles sont attribuées aux élèves. Ainsi, la création de ce type de parcours signifie anticiper les motivations qui sous-tendent un changement de comportement : par exemple ci-dessous la participation au conseil d’école.
Fernand Oury, fondateur de la pédagogie institutionnelle et des ceintures de comportement évoquées ci-dessus, s’était lui-même inspiré des grades du judo, dont le premier objet est de se fixer des limites, puis de délimiter des paliers successifs de progression technique. Progression technique mais aussi spirituelle : force de caractère, volonté, altruisme,…
A titre anecdotique, ce code couleur a été introduit dans les années 1920 dans une démarche d’occidentalisation : diffuser la pratique de la discipline à travers des résultats rapides et tangibles pour les judokas. La progression est beaucoup plus lente dans le système japonais : les ceintures blanches et marrons se conservent plusieurs années.
Concevoir et mettre en place un SSE : suite
- Les indicateurs quantitatifs
- Les différents types d’indicateurs quantitatifs
- La sélection des indicateurs quantitatifs
- Les indicateurs qualitatifs
- Les échelles de changement
- Etape 3 : sélection des méthodes
- Sommaire : les étapes de mise en place d’un système de suivi et évaluation
Date de première diffusion : 2020
Dernière actualisation : 2023