Sensibilisation à l’évaluation par Stanley Tucci et Paul Bettany. « The bridge » : Extrait du film Margin Call, 2011.
Dans le thriller financier « Margin Call« , qui dissèque les premières heures de la crise de 2008, une scène se détache par son humanité. Eric Dale, un cadre sur le point d’être licencié, se confie à un collègues. Il oppose la finance abstraite et destructrice à son ancien métier d’ingénieur en utilisant la métaphore d’un pont qu’il a construit. Il calcule une dizaine d’indicateurs qui illustrent le temps gagné ou les détours évités par les usagers grâce à ce pont. Eric Dale semble souligner la différence entre créer une valeur tangible pour une communauté et la manipulation de chiffres boursiers qui peuvent anéantir des vies.
Ce petit exercice est amusant car Eric Dale calcule de tête des chiffres vertigineux, qui démontre sa capacité hors norme pour le calcul mental et donc son côté surdoué, son potentiel inexploité à s’investir dans des projets d’utilité publique, une carrière potentiellement passée à côté de son destin. Mais aussi, le personnage nous donne une parfaite démonstration de l’exercice de sélection et de l’usage d’indicateurs.
Mais la réponse de Will Emerson (« Ne te prends pas trop la tête avec tout ça, d’accord ? Certaines personnes aiment prendre le chemin le plus long pour rentrer« ) est tout autant sidérante et liée à la pratique de l’évaluation : chacun voit midi à sa porte, et les critères sur lesquelles reposent l’analyse divergent selon les groupes, caractères, moment de vie, etc.
Mais encore, le titre du film est lui-même un indicateur : l’appel de marge est une alerte, un signal d’alarme, du courtier ne laissant pas d’autre choix que de renflouer le compte ou de liquider les positions. Voir également les seuils de déclenchement.
Dialogues
Personnage : Eric Dale, joué par Stanley Tucci
« Sais-tu que j’ai construit un pont, une fois ? J’étais ingénieur de formation.
Il allait de Dilles Bottom, dans l’Ohio, à Moundsville, en Virginie-Occidentale. Il enjambait la rivière Ohio sur plus de 270 mètres. Douze mille personnes l’empruntaient chaque jour. Et il réduisait le trajet de 56 kilomètres entre Wheeling et New Martinsville.
Ça fait un total de 1 360 000 kilomètres de conduite économisés par jour. Ou 40 millions de kilomètres par mois. Et 490 millions de kilomètres par an. D’économisés.
J’ai terminé ce projet en 1986, il y a vingt-deux ans. Donc, sur toute la durée de vie de ce pont, cela fait 10 milliards 798 millions de kilomètres qui n’ont pas eu besoin d’être parcourus. Disons, à une moyenne de 80 km/h. Ça nous donne… 134 millions d’heures. Soit 5 millions 590 mille jours.
Ce petit pont a fait économiser aux gens de ces communautés un total de 1 531 années de leur vie, à ne pas être gâchées dans une putain de voiture. Mille cinq cent trente et une années. »
Personnage : Will Emerson joué par Paul Bettany
« Hé, Eric ? Ne te prends pas trop la tête avec tout ça, d’accord ? Certaines personnes aiment prendre le chemin le plus long pour rentrer. Qui peut savoir, putain ? »

