Fayol et l’évaluation des politiques publiques

Henri Fayol, après toute une carrière de capitaine d’industrie, va consacrer les dernières années de sa vie à confronter sa doctrine administrative à des services publics. Persuadé dans un premier temps que les mêmes règles s’appliquent, de l’industrie à la fonction publique, puis que de fortes nuances et précautions s’imposent. La diffusion du Taylorisme en France va également pousser Fayol à accélérer la mise en valeur ses propres idées, à exposer les pratiques qui lui ont servi de fil conducteur tout au long de sa longue carrière. Mais il n’est pas seul, au sortir de la première guerre mondiale, de multiples intellectuels se penchent sur les changements de modèles et la meilleure organisation de la société. 

En terme de précurseurs, Henri Fayol s’inspire en premier lieu Claude Bernard pour sa méthode expérimentale. Avec un regard systémique, si des règles régissent le corps humain, si les mêmes causes produisent les mêmes effets, alors il doit en être de même pour le corps social. Fayol observe, expérimente, raisonne. Avant Kurt Levin, les travaux Fayol s’apparentent également à de la recherche-action : agir sur le réel autant qu’on l’observe1. Il s’inspire d’Auguste Compte pour sa méthode positive et sur les principes de Descartes.  

En 1917, il fonde le Centre d’Etudes Administratives (CEA) à Paris, au 100 rue de Vaugirard. L’objet est de détecter des faits sur tout le territoire, de les collecter, structurer les idées, de croiser les analyses. Des faits pour nourrir le travail scientifique, matière première pour enrichir la doctrine. Des faits comme autant d’études de cas de l’échecs, de « faits d’administration manquée » qui vont venir vérifier ou non la doctrine. Mais aussi, l’illustration des bonnes pratiques, ou comment l’application des règles de Fayol contribue au succès de l’entreprise.  


Dans l’ouvrage « L’éveil de l’esprit public » qui explicite notamment les ambitions du Centre d’Etudes Administratives, Paul Vanuxem, un des disciples de Fayol, ingénieur des manufactures de l’état, intitule un chapitre l’ « administration expérimentale ». S’interroge sur les « ressorts intérieurs » qui permettent d’apprécier le rendement collectif.

Pour aller plus loin
  • L’éveil de l’esprit public, ouvrage collectif dirigé par Henri Fayol, H. Dunod et E. Pina, 1918
  • L’Incapacité industrielle de l’Etat : les PTT, Centre d’étude administrative, Dunod, 1921
  • Enquête sur l’exploitation du monopole des tabacs et des allumettes : notes personnelles, comptes-rendus de visites de manufactures, d’entretiens…, 1922-1923
  • Fonds Henri Fayol, inventaire établi par Dominique LE ROUX, Fondation Nationale des Sciences Politiques, 1988

  1. Henri Fayol et la recherche-action, par Jean-Louis Paucelle ↩︎