Le cadre logique

Les phases d’analyses

➡ ébaucher diverses alternatives afin de sélectionner la logique d’intervention la plus appropriée

Avant et en vue d’élaborer le cadre logique, il va falloir passer par une phase d’analyses qui se décompose en quatre étapes. La somme de ces 4 étapes permettra de renseigner in fine la colonne de gauche de la matrice : la logique d’intervention.

Cette logique d’intervention se formalise par une forme narrative, une sorte de résumé du projet explicitant le déroulé de l’intervention. La lecture s’effectue de haut en bas puis de bas en haut avec ce questionnement en filigrane : est-ce plausible ? Est-ce cohérent ?

Néanmoins et avant tout, ces analyses servent à considérer l’ensemble des alternatives visant à résoudre une même problématique et à sélectionner la plus appropriée, qui sera alors mise en oeuvre.

  1. L’analyse des parties prenantes
  2. L’analyse des problèmes
  3. L’analyse des objectifs
  4. L’analyse des stratégies

En bref : des phases d’analyse à la logique d’intervention

Pour formuler une logique d’intervention, il est nécessaire de comprendre les notions de théorie du changement et de chaîne de résultats.

Récapitulons les étapes de construction du cadre : une valse à 8 temps
Ces 4 phases d’analyse préalables permettent de sélectionner la meilleure stratégie possible AVANT de débuter la rédaction des 4 colonnes du cadre logique. Attention, pour jouer son rôle de renforcement de la stratégie d’action, la colonne « hypothèses » doit être remplie en 2ème… Et surtout dans cette valse le plus important reste toujours la symbiose avec son/sa partenaire !

De l’analyse à la construction du cadre

Le cadre logique est une matrice, un tableau à double entrée, toute nouvelle donnée est susceptible d’interagir avec l’ensemble des autres données.

Une notion fondamentale et souvent oubliée dans la construction du cadre est celle d’intensité/volume. Même si une action est pertinence et cohérente (venant par là même valider la logique d’intervention), quelle est l’intensité de l’action nécéssaire (le volume) pour réellement atteindre notre objectif spécifique ?

1ère colonne

Formalisation de la logique d’intervention

Se construit de haut en bas puis se relit de bas en haut afin de vérifier la cohérence. La mise en oeuvre de chaque niveau doit permettre d’atteindre l’objectif de rang supérieur.

Pour les différents niveaux de résultats, la formulation décrit la situation souhaitée, l’état à atteindre sous forme de verbes conjugués, comme autant de pré-conditions pour atteindre un objectif de rang supérieur :

Exemples :

  • les jeunes créateurs d’entreprise ont accès au crédit
  • les acteurs locaux (collectivités locales et organisations de la société civile) ont établi leurs priorités en matière de développement

Ce narratif de la première colonne du cadre logique, plus ou moins détaillé, expose l’amélioration qualitative souhaitée. Celle-ci sera complétée par des indicateurs – intitulés Indicateurs Objectivement Vérifiables (I.O.V.), pour souligner leur caractère quantitatifs, dans la 3ème colonne de la matrice.

Ceci permettant une double lecture qualitative (la logique d’intervention) et quantitative (les I.O.V., données chiffrées permettant d’apprécier non seulement l’atteinte de chaque niveau de résultat mais aussi la cohérence globale de la logique d’intervention).

A chaque niveau correspondent des indicateurs spécifiques et pour le niveau « activités » des moyens (type de ressources) et des coûts.

La logique d’intervention décrit ainsi sur quatre niveaux le déroulé d’interactions espéré :

1. L’objectif global

A long terme, en quoi le projet contribue au développement ?

En terme de critères d’évaluation, l’objectif global est plus spécifiquement associé à l’impact. Néanmoins, il s’associe également à la cohérence interne. Est-ce que cet objectif est en adéquation avec les valeurs de la structure qui le porte (ou encore en adéquation en terme de vision, de coeur de métier, de mandat, de légitimité…) ?

2. L’objectif(s) spécifique(s)

Quels sont les effets directement imputables à l’intervention espérés au moment de la fermeture du programme ?

3. Les réalisations (intitulés produits, services ou encore extrants)

Production concrète et tangible (fourniture de biens, services, formations, constructions, etc.)  attendue du projet.

4. Les activités 

Processus à mettre en place pour aboutir à chaque réalisation. Par ordre chronologique

La logique d’intervention

➡ Exemples simplifiés de logiques d’intervention
Exemple simplifié de logique d’intervention avec un seul objectif spécifique
Exemple simplifié de logique d’intervention avec plusieurs objectifs spécifiques.

4ème colonne

Elaboration des hypothèses

La quatrième colonne se construit après avoir formalisé la logique d’intervention.

Les hypothèses sont les conditions que nous estimons voir réunies afin de valider notre projection. Les facteurs externes sont les facteurs hors de portée du programme mais qui vont venir modeler notre projection.

Cela s’apparente à de la gestion par les risques : quels facteurs externes pourraient perturber le chemin tracé dans la première colonne ? Empêcher la mise en place et le déroulement des activités prévues ? Que les activités ne conduisent pas aux réalisations  escomptés ? Que les réalisations ne produisent pas les effets escomptés ? 

Il s’agit de définir les conditions suffisantes et nécessaires pour atteindre le résultat de l’échelon supérieur. C’est souvent la colonne la plus abandonnée du cadre logique, laissée en jachère ou souffrant d’innombrables « copier/coller » depuis l’invention du raccourci clavier ctrl c. ! Des mentions génériques comme « contexte sécuritaire stable » ou « stabilité politique » sont certes pertinentes et réelles mais de peu d’intérêt si l’évolution précise du contexte n’est pas renseignée et la logique d’intervention adaptée au gré de cette évolution.

Cette colonne permet, en phase d’écriture, d’analyser les probabilités de réussite d’une stratégie. Puis en phase opérationnelle d’affiner notre connaissance des obstacles afin de mieux y répondre.

En début de phase opérationnelle, une période d’apprentissage est incontournable, même si elle n’est que trop rarement planifiée. Cette phase d’apprentissage doit être dédiée à affiner nos hypothèses.

Tel un parcours que nous effectuons pour la première fois, nous ne pouvons avoir qu’une notion assez floue du temps de trajet. Puis au fil du temps, en fonction du jour, de l’heure, du mode de transport, de l’itinéraire, nos connaissances nous permettent de savoir à quelle heure partir.

Ces hypothèses doivent par la suite être »suivies », « monitorées », de la même manière que nos objectifs pour nous permettre éventuellement de tirer la sonnette d’alarme (voir les seuils de déclenchement).

En effet, même si nous n’avons aucune prise sur un risque, quelqu’un d’autre, quel que soit le niveau hiérarchique aura prise. Par exemple, si un partenaire ne respecte pas son engagement financier, un processus de prise de décision devrait pouvoir s’enclencher, remonter chaque échelon hiérarchique, avant que cela n’affecte le niveau opérationnel.

Hiérarchie des objectifs des projets
La lecture en diagonale du cadre logique
Une lecture de haut en bas puis de bas en haut.
Exemple de lecture en diagonale entre le niveau activités et réalisations.

Cette lecture en diagonale permet de tester et de consolider le premier niveau de cohérence du cadre : sa logique horizontale.

Logique verticale du cadre logique

2ème colonne

Les Indicateurs Objectivement Vérifiables (IOV)

Les indicateurs du cadre logique sont appelés IOV : leur rôle est d’éclairer les réalisations, l’objectif spécifique et l’objectif global sous un jour effectivement vérifiable.

Selon les concepteurs de la méthode du cadre logique, leur fonction est de pouvoir prouver le succès d’un projet de manière irréfutable : que même les plus sceptiques s’inclinent face à des résultats préalablement exposés, suivis avec régularité et le moment venu, en fin de projet, imputables. Tel un score sans appel lors d’un évènement sportif.

Ce sont des indicateurs de performance : ils mesurent l’atteinte des résultats. Ces indicateurs de performance s’accompagnent donc nécessairement :

  • d’un point de repère préalable (situation de référence, point de départ, baseline)
  • d’un point de situation (valeur collectée à la date de dernière mesure)
  • de seuils ou paliers (permettant l’analyse et réajustement si un seuil n’est pas atteint
  • des cibles (ou estimations) : les valeurs visées

Dans la matrice de 4×4, l’indicateur apparait directement relié à sa cible, (par exemple le revenu moyen des producteurs augmente de 100 à 130 baths dans les 2 ans). Les modèles de cadre logique les plus récents intègrent 2 colonnes complémentaires (situation de référence, valeur cible).  Dans tous les cas, un tableau de suivi des indicateurs doit intégrer ses données.

Matrice du cadre logique : les indicateurs

La pertinence des indicateurs est aussi fondamentale que celle des objectifs. Ceux-ci doivent être bien pensés, intelligents : SMART

  • Specific (spécifique – un indicateur ne mesure qu’un seul aspect du projet)
  • Measurable (mesurable – deux évaluateurs trouveraient le même résultat)
  • Achievable (atteignable)
  • Reliable (fiable)
  • Time-bound (temporellement défini)
Situation en fin de projet

Une mention est souvent oubliée dans les cadres logiques mais pourtant fondamentale est la notion de « situation en fin de projet » reliée aux indicateurs de l’objectif spécifique.

En effet, cette case est centrale puisqu’elle illustre dès l’écriture du projet, la vision de la situation telle qu’espérée au moment de sa clôture, si le cheminement prévu, la logique d’intervention, se confirme. Quelles seront, puisque détaillées et explicitées sur cette même ligne dans la colonne indicateur – les données prouvant que le projet est un succès ? 

En savoir plus sur la construction d’indicateurs

3ème colonne

Les sources de vérification


Quelles sont les sources d’information ? D’où sont issues les données qui vont permettre de mesurer et déterminer les indicateurs de la deuxième colonne ?

Egalement souvent négligée, cette colonne est fondamentale. Elle permet de visualiser les entrailles de votre système de suivi et évaluation. D’ouvrir le capot pour entrevoir les mécaniques. Pour rester sur cette analogie, si les indicateurs constituent le tableau de bord de votre véhicule; la colonne « sources de vérification » doit renseigner sur le type de carburant, la circulation du carburant entre les différents éléments du moteur et les sources d’approvisionnement.

La case sources de vérification correspondant à l’objectif global sera alimentée par des données secondaires (collectées en externe) : par exemple un institut national statistique, une revue nationale des ODD, les données ouvertes de la Banque Mondiale ou des bases de données thématiques (voir référencement des Nations Unies ici).

En ce qui concerne les sources de vérification des objectifs spécifiques, l’alimentation en données sera effectuée :
– d’une part par les évaluations externes programmées
– de l’autre via les outils mis en place en interne permettant de détecter les effets naissants (veille documentaire, observation, entretiens, questionnaires, etc.) et le mode de compilation, par exemple à travers leur intégration à un tableau de suivi des indicateurs.

Les sources de données permettant d’éclairer les réalisations (produits, extrants) seront à minima disponibles à travers le tableau de suivi des indicateurs, lequel détaillera en annexe l’outil de collecte utilisé, le mode de calcul de l’indicateur, l’échantillon, la fréquence de collecte, la ou les personne(s) en charge de la collecte, etc.

La colonne source de vérification devrait faire apparaitre l’ensemble des strates de reporting (hebdomadaire, mensuelle, trimestrielle, du terrain vers le siège et du siège vers le terrain) afin de s’assurer que chaque donnée collectée est utilisée – c’est à dire que chaque format de reporting trouve la place qui lui corresponde dans le cadre logique.

Cette colonne « source de vérification » de la matrice du cadre logique devrait ainsi être formalisée au plus tard lors du démarrage de l’action notamment parce qu’elle participe à la sélection des indicateurs. Pour reprendre l’image mécanique précédente, avant de choisir une motorisation en fonction de la puissance du moteur, mieux vaut anticiper la consommation (le coût de la collecte des données) et le type de carburant disponible localement (accessibilité et fiabilité des données).

Les moyens et les coûts

Les ressources humaines, matérielles et financières requises pour entreprendre les actions programmées. 

La logique horizontale

La logique horizontale du cadre logique.

La cohérence horizontale s’apprécie au fur et à mesure de l’élaboration de la matrice, case par case.

Au niveau des indicateurs :

Est-ce que les indicateurs identifiés permettent de mesurer l’atteinte du niveau de résultat concerné ?

Au niveau des sources de vérifications :

Est-ce que le dispositif de collecte de données envisagé permettra de renseigner les indicateurs sélectionnés ?

Au niveau des moyens et des coûts :

Est-ce que les moyens sont cohérents au regard des activités programmées ? Est-ce que le budget prévisionnel est cohérent au regard des moyens sollicités ?

Finalisation du cadre logique

Une lecture en diagonale du cadre logique

Une double relecture horizontale et verticale va ainsi être nécessaire afin de vérifier la cohérence de la matrice.